Des négociations seront possibles ... après la "reddition inconditionnelle de tous les combattants et la remise aux autorités fédérales des bandits ..."

Vladimir Poutine met en doute une reconstruction rapide de la Tchétchénie

7 septembre 2001


MOSCOU, 7 sept (AFP) - Le président Vladimir Poutine a mis pour la première fois en doute vendredi une reconstruction rapide de la Tchétchénie tant que "l'ordre n'y serait pas rétabli", tout en posant à nouveau des conditions quasi irréalistes à la tenue de pourparlers avec les rebelles.

"Qu'allons-nous construire en Tchétchénie? Construire, pour demain à nouveau bombarder et détruire? Il est évident que tant que l'ordre ne sera pas rétabli, tant que le peuple tchétchène n'aura pas la possibilité de travailler dans les forces de l'ordre et les services de sécurité (FSB, ex-KGB), nous ne ferons rien là-bas", a déclaré M. Poutine, lui-même un ancien agent du KGB, lors d'une réunion avec des dirigeants et des responsables régionaux à Kislovodsk, dans le territoire de Stavropol frontalier de la Tchétchénie.

Ces déclarations de M. Poutine s'écartent nettement de la position adoptée jusqu'à présent par Moscou, selon laquelle la reconstruction de la Tchétchénie, certes difficile, avançait et allait contribuer à la normalisation. Le gouvernement y a alloué 514 M USD pour 2001 et, fin mars, le président en avait critiqué la lenteur.

Vladimir Poutine a fait jeudi une arrivée impromptue dans le Caucase russe, qui a coïncidé avec le dixième anniversaire de l'"indépendance" de la Tchétchénie pour les séparatistes.

Le 6 septembre 1991, le Soviet suprême à Grozny, l'un des principaux organes du pouvoir soviétique, a été pris d'assaut par la milice de Djokhar Doudaïev qui devait devenir le premier président indépendantiste de Tchétchénie.

Les forces fédérales mènent depuis presque deux ans en Tchétchénie une "opération antiterroriste", selon l'appellation officielle russe, qui a fait plusieurs milliers de victimes dans les rangs russes et tchétchènes.

Abordant le sujet épineux des réfugiés tchétchènes en Ingouchie, une république voisine de la Tchétchénie, le chef de l'Etat russe a assuré l'aide de Moscou aux Tchétchènes qui "souhaitaient demeurer en Ingouchie et avaient l'autorisation de le faire". Il s'agit de quelque 140.000 personnes, selon les chiffres officiels. Auparavant, le pouvoir fédéral cherchait à les faire rentrer en Tchétchénie.

A l'issue de la séance, le président a été interrogé par la presse sur l'initiative du chef de la fraction libérale SPS Boris Nemtsov qui s'est rendu cette semaine en Tchétchénie pour chercher à servir d'intermédiaire à des pourparlers avec le président tchétchène Aslan Maskhadov.

M. Poutine s'est déclaré prêt à négocier avec "quiconque" en Tchétchénie, dont implicitement le président Aslan Maskhadov, mais seulement après la reddition de tous les combattants tchétchènes, une condition qui n'a guère de chances d'être remplie.

"Nous sommes prêts à entrer en contact avec quiconque, mais seulement dans le respect de la constitution de la Fédération russe dont la Tchétchénie fait partie", a déclaré M. Poutine sur la chaîne publique RTR. Ces conditions, a-t-il rappelé, sont la "reddition complète et inconditionnelle de tous les combattants et la remise aux autorités fédérales des bandits les plus odieux qui sont trempés jusqu'aux coudes du sang du peuple russe".

"Si des députés de la Douma (chambre basse), et notamment Boris Nemtsov, sont capables de faire respecter ces conditions, qu'ils le fassent. S'ils n'en sont pas capables, qu'ils cessent de s'agiter sur la scène politique du pays et qu'ils remettent leur mandat de député", a encore déclaré M. Poutine, ajoutant que ce genre d'initiative n'avait "plus aucun sens".

M. Poutine a maintes fois qualifié de "criminel" le président Maskhadov, dont Moscou ne reconnaît plus la légitimité depuis le début du conflit dans la république rebelle le 1er octobre 1999.