Reporters sans frontières
Rapport 2001
sur la situation de la liberté de la presse en Russie
(extrait du rapport)
11 avril 2001
La prise de contrôle de la chaîne de télévision NTV par l'Etat russe, à travers la compagnie d'Etat Gazprom, intervient après des mois d'une dégradation continue de la situation de la liberté de la presse, constatée tout au long de l'année 2000 et sur tout le territoire de la fédération de Russie.
L'élection présidentielle du 26 mars 2000 a été marquée par un parti pris évident des chaînes de télévision d'Etat ORT (semi-publique) et RTR (publique) en faveur du candidat Vladimir Poutine, alors président par intérim. La moitié du temps d'antenne de la campagne lui a été accordée, les onze autres candidats se partageant le reste. Le 21 février, Guennadi Ziouganov, principal adversaire de Vladimir Poutine à l'élection présidentielle, a dénoncé l'"arbitraire" règnant dans les médias publics.
Le contrôle de l'information sur la Tchétchénie a été très sensiblement accru, le gouvernement et l'armée cherchant à éviter un retournement de l'opinion contre l'action russe dans la République indépendantiste. En janvier 2000, le Kremlin a créé un poste de coordinateur des médias pour la Tchétchénie et un centre de presse qui diffuse quotidiennement l'information officielle et organise des voyages dans la zone de guerre, sous étroite surveillance d'officiers russes. Le 15 mars, le ministère russe de l'Information a interdit aux médias de rapporter les propos des principaux leaders tchétchènes, dont le président Aslan Maskhadov. En cas de non-respect de cette règle, le ministère de l'Information retire, après deux avertissements, la licence du média en faute et suspend, voire menace d'interdire, sa diffusion en Russie. Les organes de presse étrangers connaissent parallèlement des difficultés croissantes à exercer leur activité et les accréditations pour la Tchétchénie sont, dans les faits, impossibles à obtenir.
Les autorités russes ont, à plusieurs reprises, rappelé leur intention de mieux maîtriser le "secteur stratégique" de l'information. Annoncée et théorisée dans la "doctrine sur la sécurité de l'information", approuvée par le président Poutine le 13 septembre 2000, cette politique de "renforcement des médias d'Etat" en charge de "la diffusion d'une information fiable aux citoyens russes" a été mise en uvre de façon systématique. L'épreuve de force mise en scène par les pouvoirs publics russes avec les "oligarques" du secteur de l'information, s'est ainsi soldée par la prise de contrôle pure et simple par l'Etat de la seule chaîne privée d'audience nationale, NTV, et semble t-il également de la chaîne de télévision semi publique ORT, chaîne de télévision disposant de la plus forte audience sur tout le territoire de la Fédération de Russie. Son propriétaire, Boris Berezovski, avait dénoncé, en août 2000, la volonté de l'Etat, de prendre le contrôle de l'ORT et annoncé sa décision de confier la gestion des parts de la chaîne qu'il contrôlait (49%) à un groupe de personnalités attachées à l'indépendance de la chaîne. Ces parts auraient semble t-il été finalement vendues au groupe pétrolier Sibneft, une entreprise publique. L'ancienne chaîne de télévision de l'Union soviétique, partiellement privatisée en 1993, et qui s'était montrée particulièrement critique envers le président Poutine au moment de l'affaire du sous-marin Koursk, pourrait ainsi rejoindre la chaîne publique RTR, sous tutelle complète de l'Etat.
Reporters sans frontières
Pour le rapport entier voir : http://www.rsf.fr/home.html