Un appel lancé par le théâtre du radeau et plus de 130 artistes et intellectuels

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English version

Monsieur Poutine et l'Europe,
QU'ON NOUS EXPLIQUE !

22 novembre 2002

Nous ne désirons pas ajouter aux articles, enquêtes, éditoriaux et dossiers de la presse, aux rapports des ONG russes et européennes, des observateurs de l'OSCE, des émissaires du HCR, qui témoignent tous de l'ampleur des exactions commises par les troupes russes en Tchétchénie. Et nous ne répéterons pas ici la liste des forfaits perpétrés contre les civils : arrestations arbitraires, détention dans des camps de filtration, viols, tortures, assassinats, enlèvements contre rançon, commerce de cadavres.

Nous voulons bien penser qu'en l'absence de qualification juridique il reste difficile de nommer "génocide" la somme de ces crimes. Qu'on nous dise alors comment qualifier un processus d'élimination qui met en péril l'ensemble du peuple tchétchène.

Nous savons que la politique étrangère ne peut se contenter de grands principes et qu'elle doit poursuivre des objectifs réalistes. En fait de "pragmatisme", nous constatons que les appels à la "retenue", loin d'empêcher l'escalade, tendent à légitimer la violence du Kremlin. Nous aimerions saisir quel avantage l'Union européenne trouve à permettre de telles abominations. Nous voyons bien l'intérêt de l'Alliance atlantique dans la construction d'un front mondial contre la menace terroriste. Alors pourquoi faire silence sur une terreur d'Etat qui risque de l'attiser ? La coopération des polices est sans aucun doute nécessaire. Faut-il pour autant avaler les amalgames de la propagande poutinienne ? Il faudrait qu'on nous éclaire sur la cohérence d'une coalition qui condamnerait pêle-mêle lutte anticoloniale et terrorisme, gouvernement légitime et factions islamistes, partisans et kamikazes.

Nous voulons croire la Russie promise à un bel avenir démocratique. Qu'on nous explique tout de même en quoi nous l'encourageons dans cette voie en fermant les yeux sur la brutalité de M. Poutine, quand il applique à l'administration le modèle de l'ex-KGB, manipule les groupes d'intérêt économique, muselle la presse écrite et audiovisuelle, excite le racisme contre les Caucasiens et les musulmans, et lorsqu'il montre son mépris pour la vie des citoyens de la Fédération - des spectateurs du Théâtre de la Doubrovka aux habitants de Grozny.

Nous pensons que nos dirigeants ont la louable ambition de construire une maison commune avec la Russie. Ils devraient exposer comment ils entendent y parvenir en laissant Moscou bafouer les conventions internationales, ridiculiser le Conseil de l'Europe, l'OSCE et finalement l'Union européenne. A quoi ressemblera l'espace européen, si les valeurs démocratiques y subissent les "variantes et interprétations dérogatives" chères au président russe ? L'Europe a besoin d'acheter du pétrole et du gaz, de vendre des airbus, voire des trains à grande vitesse. Mais l'opinion publique a le droit de savoir si le silence sur la situation en Tchétchénie est une condition sine qua non à la conclusion de ces marchés. Il est enfin clair que les capitales européennes cherchent à se concilier les bonnes grâces de Moscou dans les négociations serrées concernant l'Irak au Conseil de sécurité des Nations unies. Cela suffit-il à justifier le fait que nos gouvernements reçoivent en grande pompe les autorités russes, sans les inviter publiquement à relancer leurs pourparlers avec le gouvernement élu d'Aslan Maskhadov ?

Nous saluons volontiers les efforts que la diplomatie européenne a consentis pour exprimer son inquiétude au début de cette seconde guerre. Nous approuvons son appel à une solution politique. Mais comment favoriser celle-ci, quand au moindre froncement de sourcils de M. Poutine, l'Europe accepte d'emprisonner le négociateur tchétchène, l'acteur Ahmed Zakaev, que la Russie reconnaissait hier encore comme un interlocuteur crédible ?

En attendant des réponses à ces questions, il nous importe de contribuer à la recherche de l'issue pacifique que le Conseil européen affirme souhaiter. C'est pourquoi nous demandons aux autorités de remettre un visa de libre circulation à M. Zakaev et ses collègues, que nous invitons en compagnie de démocrates russes, dans les théâtres, les cinémas, les bibliothèques, les universités et autres lieux publics, afin qu'ils puissent exposer la situation en Tchétchénie et émettre leurs propositions de paix devant l'opinion, la presse, ainsi que nos élus.

merci de répondre : tel 00 33 2 43 24 93 60 ou fax 00 33 2 43 28 51 62
ou mail : radeau@wanadoo.fr


To Mr Putin and Europe:
CAN SOMEBODY PLEASE TELL US...

We don't intend to add to the mass of articles, inquiries, editorials and studies in the press, of reports by Russian and European NGOs, OSCE observers and HCR emissaries, all bearing witness to the magnitude of the atrocities committed by Russian troops in Chechnya. And we won't repeat the list of wrongs done to civilians - arbitrary arrests, detention in filtration camps, rape, torture, murder, kidnapping for ransom and trade in dead bodies.

It's hard to apply the term "genocide" to this collection of crimes in the absence an official judicial designation, we agree. But can somebody tell us what to call a process of elimination of human beings which imperils the very existence of the Chechen people.

We agree that foreign policy can't be defined by high principles alone, it must pursue realistic goals. But pragmatically, we note that all appeals to "restraint", far from preventing escalation, only tend to make the Kremlin's violence appear to be justified. We would like to understand what advantage the European Union can gain by allowing these abominations. We understand that it's in NATO's interest to build a global front against the threat of terrorism. But then, why keep silent about a state's terrorism that might just fan those flames? International policy co-ordination is doubtless necessary. But is it necessary to swallow Putin's propaganda? Somebody must enlighten us about the coherence of a coalition which condemns pell-mell an anti-colonial struggle and terrorism, a legitimate government and Islamic factions, freedom fighters and suicide killers.

We'd like to believe that Russia has a fine democratic future before it. But can someone please explain how we are encouraging it in that direction, when we shut our eyes to Putin's brutality as he models his administration on the former KGB, manipulates economic interest groups, muzzles the press and the electronic media, stirs up racism against Caucasians and Muslims, and shows disdain for the lives of the Russian Federation's own citizens, from the Dubrovska theatre's audience to the residents of Grozny.

We believe that our leaders want to construct a common house with Russia - a praiseworthy ambition. But they should explain how they intend to accomplish this by letting Moscow flout international conventions and ridicule the Council of Europe, the OSCE and the European Union. What can we hope for from Europe as it evolves, if its democratic values are subject to "derogatory variants and interpretations" so dear to the Russian president? Europe needs to buy oil and gas, it needs to sell airplanes and high-speed trains. But if silence on the situation in Chechnya is a precondition for opening these markets, public opinion has the right to know it. It is clear that the European powers want to get Moscow in their good graces when it comes to tight negotiations in the UN Security Council over Iraq. But does that justify the fact that our governments receive the Russian leaders with great ceremony, without asking them publicly to renew talks with the government of the legitimately elected Chechen president, Aslan Maskhadov?

We welcome European diplomacy's expressions of concern at the start of this second war, and we approve of its call for a political solution. But how is this position being supported, when Mr Putin has only to frown and Europe agrees to imprison the Chechen neociator, the actor Akhmed Zakayev, whom Russia recognized only yesterday as a credible negotiating partner?

While waiting for answers to these questions, we feel we must contribute to the search for a peaceful solution, in accordance with the expressed wishes of the European Council. Therefore, we ask the appropriate authorities to issue a visa to Mr Zakayev and his colleagues granting them freedom of movement, and we invite them, together with Russians of democratic persuasion, to come to our cinemas, libraries, universities and other public places, in order to explain the situation in Chechnya and put their peace proposals before our public, our press and our elected officials.

Please reply by phone: 00 33 2 43 24 93 60 or fax: 00 33 2 43 28 51 62
or by email: radeau@wanadoo.fr



Ulrike Ackermann, sociologue, Allemagne
Patrick Aeberhard, Pdt honoraire MDM
Giorgio Agamben, philosophe
Marianne Alphant, écrivain
Jean-Pierre Audigier, professeur à Paris VIII
Antonio Attisani
Catherine Auclaire-Lastmangoff, graphiste
Agnès B
Ahmed Bakcan, docteur ès Lettres, secrétaire général de Milli Görüs de France
Etienne Balibar, philosophe
Marco Bellini, traducteur
Yézékiel Ben-Ari, chercheur
Ely Ben-Gal, historien
Thijs Berman, journaliste
Fethi Benslama, psychanalyste
Didier Bezace, directeur Théâtre de la Commune, Paris
Jane Birkin
Frode Bjornstad, comédien
Jacques Blanc, directeur de théâtre
Ginevra Bompiani, écrivain
Elena Bonner, The Andrei Sakharov Foundation
Pierre Boulez, compositeur
Alima Boumedienne-Thiery
Marcel Bozonnet
Olivier Brachet, Cimade (Lyon)
Alain Brossat, professeur
Pascal Bruckner, écrivain
Hinnerk Bruhns, historien
Vladimir Bukovsky
Hans-Cristophe Buch, écrivain
Christine Burgos,artiste chorégraphique
Leos Carax, cinéaste
Laurence Chable, comédienne
Patrice Chéreau
Eric Chevance, directeur de théâtre
Yves Cohen, historien
Vincenzo Consolo, écrivain
Hélène Cixous, philosophe
Dominique Collignon-Maurin, comédien
Marie Collin, festival d'Automne
Jean-Louis Comolli, cinéaste
Constantin Costa Gavras, cinéaste
Bora Cosic, Berlin
Georges Dallemagne, sénateur belge (Bruxelles)
Catherine Dan, secrétaire général, théâtre de la Commune
Sophie Delizée, chanteuse
Emilie Deleuze, cinéaste
Fanny Deleuze, traductrice
Daniele Del Giudice, écrivain
Arielle Denis, journaliste, co-président du Mouvement de la Paix
Jacques Derrida, philosophe
Catherine Diverrès, chorégraphe
Dominique Dolmieu, metteur en scène
Giselle Donnard, historienne
Jean Douchet
Claudie Douet, danseuse
Christian Doumet, professeur à Paris VIII
Olivier Duhamel
Olivier Dupuis, member of the European Parlement
Pascal Dusapin, compositeur
Bernard Faivre d'Arcier, festival d'Avignon
Gérard Fabbiani, musicien
Michel Feher, philosophe
José-Luis Ferreira, directeur du Festival International de Porto
Katja Fleig, artiste chorégraphique
Bernard Fleury, directeur du Maillon
Jean-Louis Fournel, professeur à Paris VIII
Alain Françon,metteur en scène
Konstanty Gebert, éditorialiste polonais, chef de la communauté juive
Olivier Gelpe, artiste chorégraphique
Denis Gheerbrant, cinéaste
Philippe Gilbert
Carlo Ginzburg, historien
André Glucksmann, philosophe
Jean-Luc Godard, cinéaste
José-Manuel Gonzalvès, directeur de théâtre
Romain Goupil, cinéaste
Alain Grombecque, festival d'Automne
Klaus Michael Grüber, metteur en scène
Eric Hazan, éditeur
Patrick Hersant, maître de conférences à Paris VIII
Jean-Marc Huitorel. Critique d'art
Rada Ivekovic, philosophe
Jean Jourdheuil
Alain Joxe, écrivain
Okada Kazuo, scientific film maker
Didier Kiner
Viktor Kirchmeier
Nicolas Klotz, cinéaste et metteur en scène
Dr. Hans Krech, Sicherheitsexperte, Germany, Hamburg
Bernard Kouchner
Serge Lalou
Malva Landa, member of the first "Helsinki Group"
Valérie Lang, comédienne
Matthias Langhoff, metteur en scène
Claude Lanzmann
David Lapoujade, maître de conférence à Paris I
Irena Lasota, presidente, Institut for Democracy in Eastern Europe (Washington)
Claude Lauro-Marty, faculté de pharmacie, Clermont-ferrand
Michel Le Bris
François Le Pillouer
Bernard-Henri Lévy, philosophe
Alain Liévaux
Hans Peter Litscher, auteur/metteur-en-scène
Frédérique Longuet-Marx, ethnologue
Simone Longuet-Marx, sculpteur
Ekkehard Maass, Deutsch-Kaukasische Gesellschaft
J.L. Machuron, fondateur Pharmaciens sans Frontières
Jean-Paul Manganaro, professeur
Toni Maraini
Joëlle Marelli, traductrice
Giwi Margwelaschwili, écrivain, Berlin
Maguy Marin, chorégraphe
André Markowicz, traducteur
Daredjan Markowicz
Romain Markowicz
Jean-Louis Martinelli, metteur en scène
José-Maria Mendiluce, député européen, écrivain
Stéphanie du Mesnildot, journaliste
Gildas Milin, auteur et metteur en scène
Françoise Morvan, écrivain
Ariane Mnouchkine
Mathilde Monnier, chorégraphe
Edgar Morin
Véronique Nahoum-Grappe, chercheur en sciences sociales
Oumarou Narey, juriste (Genève)
Pap Ndiaye, maître de conferences à l'EHESS
Jacques Neefs, professeur à Paris VIII
Toni Negri, philosophe
Monique Nemer, éditrice
Rupert Neudeck, fondateur de CAP ANAMUR, médecins de secours allemands
Steffen Noack, professeur
Jean-Christophe Nothias, éditeur de presse
Bertrand Ogilvie, philosophe
Paul Otchakovsky-Laurens, éditeur
Bernard Outtier, ethnolinguiste (CNRS)
Pierre Pachet, Professeur à Paris-VII
Catherine Pauchet, sociologue
Giorgio Passerone, écrivain
Pierre Pelot, écrivain
Charles Pennequin, poète
Elisabeth Perceval, scénariste
Michel Piccoli
Cathrin Pichler, curator
Marc Ponthus, chef d'orchestre (Etats-Unis)
Victoria Poupko, mathématicienne
Olivier Py, metteur en scène
Jacques Rancière, philosophe
Paul Rondin, administrateur de théâtre
Dr Said-Khassan Abumuslimov, historkier, Grozny
Elias Sanbar, écrivain
Mylène Sauloy, réalisatrice
Eugene Schoulgin, écrivain (Norvège)
Peter Schneider
Martin Schulthess, assistant parlementaire
Jean-Marc Ségalen, artiste
Peter Sellars
Alexey Semyonov, The Andrei Sakharov Foundation
Andrzej Seweryn, comédien
Bashkim Shehu, écrivain
Bernard Sobel, metteur en scène
François Soltic, militant politique
Aleksander Smolar, chercheur
Claudia Stavisky, metteur en scène
Veton Surroi, éditorialiste (Pristina)
Antonio Tabucchi, écrivain
François Tanguy, metteur en scène
Mairbeck Taramov
Nadia Tazi, philosophe
Jacques Theureau, historien
Charles Tordjmann, metteur en scène
Gérard Toulouse, physicien
Alain Touraine
Mairbek Vatchagaev, historien EHESS
Monique Veaute
Emmanuel Videcoq, secrétaire de rédaction
Pierre Villard, enseignant, co-president du Mouvement de la Paix
Paolo Virno, philosophe
Dominique Voynet, secrétaire national des Verts, ancien ministre
Emmanuel Wallon, maïtre de conférences à Paris
Boris Weil, copenhagen
Julie Wornan, militante
Luc Wouters, écrivain
Jean-Claude Zancarini, maître de conférences à l'ENS (Lyon)
Michèle Zancarini-Fournel, professeur à l'IUFM (Lyon)

Ceux qui souhaitent signer l'appel sont invités à envoyer un mail :
- personnalités, artistes, écrivains, universitaires, ... : marchodoryila@yahoo.fr
- autres : radeau@wanadoo.fr