Tchétchénie : notes géographiques et historiques

République de la Fédération de Russie, située sur le versant nord du Caucase, limitée à l'ouest par l'Ingouchie, et à l'est par le Daghestan. Sur 19 300 km2 vivent 1,2 million d'habitants (Tchétchènes, 58 %; Ingouches, 13 %; Russes, 23 %).

Géographie physique et économique
Le pays se compose de trois ensembles: la haute montagne du Grand Caucase (4 480 m), avec ses versants d'économie pastorale ovine en déclin; le piémont, avec ses cultures spécialisées (vigne, vergers, tabac, légumes), de plus en plus densément peuplé par des apports de montagnards: la capitale Groznyï, nœud du réseau de transport de tout le Caucase Nord, concentrait, avant la guerre contre la Russie, plus de 400 000 habitants et plus de 70 % de la production industrielle du pays; les plaines steppiques et continentales, domaine de transhumance et de céréaliculture.

Histoire
Peuple caucasien islamisé, les Tchétchènes ont valeureusement résisté à la progression russe des XVIIIe et XIXe siècles, jusqu'à la chute de leur chef Chamil (1859): Groznyï ("la Terrible" en russe) devient ville de garnison russe. Après la prise de pouvoir bolchevique, leur territoire est successivement partie de la "République autonome des montagnes", "Région autonome", puis portion de la Fédération de Russie, à nouveau "République autonome" mais en association avec les Ingouches (1936). En 1944, Tchétchènes et Ingouches sont déclarés "peuples punis" et déportés en Sibérie, leur république disparaît et est colonisée par des Russes et des Géorgiens jusqu'en 1957, date à laquelle la déportation est suspendue et la république recréée. Ce long passé d'adversités est évidemment une source de ressentiments très vifs des populations locales envers les Russes, et il n'est pas surprenant que cette hostilité se soit transformée en conflit ouvert après la chute du système soviétique.

En 1991, les nationalistes tchétchènes, dirigés par le général D. Doudaïev, proclamèrent leur indépendance et leur séparation d'avec les Ingouches: cette situation fut, dans un premier temps, reconnue par les Russes. Le conflit devint ouvert lorsque la nouvelle république refusa de signer le traité fédéral russe: à la fin de 1994, l'armée russe intervenait avec la plus grande brutalité.

L'intervention russe en Tchétchénie (1994-1998)
La situation de la Tchétchénie fait en effet de cette région une pièce géopolitique capitale pour la Russie. Des oléoducs traversent le pays, dont l'un est stratégique pour l'approvisionnement russe : courant de l'Azerbaïdjan à la mer Noire, il atteint Novorossirsk, dernier grand port de la région à être sous le contrôle direct de Moscou.

Le 11 décembre 1994, après des bombardements massifs, l'armée russe lançait une opération visant à réduire la résistance des indépendantistes tchétchènes, opération que le ministre de la Défense de l'époque, Pavel Gratchev, envisageait comme une campagne éclair. Un an après, et des dizaines de milliers de morts plus tard, la guerre durait toujours; les blindés russes, étaient péniblement parvenus à entrer dans la capitale, Groznyï, réduite en ruines par des bombardements massifs. Moscou s'était pourtant engagé - en échange de la reprise de l'examen de l'entrée de la Russie au Conseil de l'Europe, un moment suspendu - à négocier une solution politique, fondée sur des élections libres organisées à l'issue d'un accord de désengagement militaire. Mais ces négociations, ouvertes sous la pression d'une spectaculaire prise d'otages opérée par les Tchétchènes à Boudennovsk (Russie), furent finalement rompues, et les Russes renoncèrent à appliquer l'accord militaire qu'ils avaient signé.

En 1996, devant l'échec militaire, et conscient que la poursuite de ce conflit pouvait compromettre sa réélection à la présidence de la Fédération de Russie, B. Eltsine fut contraint d'envisager une solution politique négociée. Le chef du Kremlin sollicita alors l'entremise de l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), dont le concours permit la signature d'un premier cessez-le-feu avec le nouveau chef des indépendantistes, A. Maskhadov - D. Doudaïev ayant été tué quelques mois plus tôt par un missile russe -, et B. Eltsine signait un décret de retrait partiel des troupes russes de Tchétchénie. Mais, au lendemain de la réélection de B. Eltsine, les opérations militaires reprirent, accréditant l'idée que le cessez-le-feu n'avait pas plus de consistance que les promesses électorales. Toutefois, la réaction des combattants tchétchènes - qui reprenaient le contrôle de Groznyï, infligeant à l'armée russe une défaite cuisante - mettait en évidence l'incapacité de Moscou à rétablir l'ordre.

B. Eltsine autorisa alors le général Lebed à entamer des négociations avec les indépendantistes, et à signer avec eux un accord sur un règlement politique du conflit définissant un nouveau statut de la Tchétchénie " en tant que partie intégrante de la Fédération de Russie " ; à charge pour le général Lebed, qui avait toujours prôné un règlement pacifique, de trouver une solution à cette débâcle politique et militaire. Le 31 août 1996 étaient signés un accord de paix, et une déclaration commune, adoptant une formulation volontairement vague, fondée sur le principe du " report de la décision " sur le futur statut de la Tchétchénie au 31 décembre 2001, qui mettaient fin à un conflit où le nombre des victimes s'élevait déjà à 60 000, voire 80 000, la plupart civiles. En janvier 1997, au terme d'une élection présidentielle dont le caractère démocratique fut saluée par l'OSCE, Aslan Maskhadov, chef militaire incontesté et qui avait durant deux ans dirigé la guerre contre les Russes, était porté à la tête de l'État. Cette élection fut suivie, le 12 mai, de la signature d'un accord de paix avec la Russie, puis le 11 juillet, de celle d'un accord douanier favorable à la Tchétchénie et d'un accord bancaire favorable à la Russie. Un accord sur la remise en service d'un vieil oléoduc reliant la Caspienne à la mer Noire via la Tchétchénie a encore été conclu le 9 septembre 1997.

Après la démission du gouvernement, en janvier 1998, le président A. Maskhadov chargea Chamil Bassaïev de former le nouveau cabinet. Auteur de la prise d'otages russes à Boudennovsk, en 1995, ce dernier dut faire face à l'hostilité de Moscou

Le processus de paix reste fragile et est régulièrement menacé par des prises d'otages. La Tchétchénie, soucieuse de préserver son autonomie vis-à-vis de la Russie, envisage maintenant de raccorder l'oléoduc reliant Groznyï au port géorgien de Poti à la future ligne Bakou-Ceyhan, et de contourner l'isolement où la maintient Moscou en nouant des relations avec le monde extérieur. Un projet de " marché caucasien " est ainsi initié par l'ancien président de la BERD, Jacques Attali, et par l'ex-ministre soviétique des Affaires étrangères B. Pankine, suscitant l'inquiétude des Russes. En 1999, le conflit opposant les rebelles islamistes du Daguestan au pouvoir russe, s'étend à la Tchétchénie entraînant l'intervention de l'armée russe. Alors que le nombre de morts de part et d'autre s'alourdit, les exactions commises par les soldats russes, notamment en matière de droits de l'Homme, sont dénoncées par la communauté internationale. Si les autorités de Moscou justifient les interventions militaires comme une lutte contre le terrorisme, aucune issue ne semble envisageable à la fin du premier semestre 2000, tandis que le sort de la population civile demeure précaire à l'approche de l'hiver.

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